Fiche d'identité
La modulatrice de mTOR fait parler d’elle
La rapamycine est dérivée d’une bactérie découverte en 1964 dans les Iles de Pâques par un groupe de recherche canadien. Depuis sa découverte et son exploitation sous divers noms [1] (everolimus, sirolimus, notamment), la rapamycine a été utilisée dans le traitement dans le cadre de deux pathologies spécifiques:
- La transplantation d’organes [2] : par son action immunosuppressive, c’est à dire qu’elle empêche le système immunitaire du receveur de rejeter son nouvel organe,
- Le cancer [3]: par son action anti-proliférative, c’est à dire qu’elle arrête la reproduction des cellules cancéreuses et donc l’expansion métastatique du cancer.
De récentes études se sont penchées sur sa possible utilité dans la lutte contre le vieillissement, avec des résultats intéressants mais à considérer avec retenue [4].
Un immunosuppresseur pour mieux vieillir ?
La rapamycine est avant tout un inhibiteur de mTOR, une molécule centrale dans un grand nombre de mécanismes physiologiques et dont la dérégulation peut entrainer cancers, maladies neurodégénératives et maladies métaboliques.
mTOR, un acteur majeur dans nos cellules
Il est très complexe de comprendre la totalité des rôles de mTOR dans notre corps, du fait de sa pléiade d’actions, parfois contradictoires, sur une multitude de processus physiologiques et pathologiques [5, 6]. C’est une enzyme, de type kinase, impliquée dans la prolifération, la croissance, la mobilité et la survie cellulaire mais aussi dans la synthèse protéique et la transcription [5]. Elle est la cible de la rapamycine, d’où son nom mechanistic Target Of Rapamycin.
Rôle de la rapamycine dans la lutte contre le vieillissement
Sachant cela, il est compréhensible que les chercheurs se soient intéressés à la rapamycine et à mTOR. Des études, pour le moment au stade animal montrent que la prise de rapamycine à petite dose augmente la durée de vie chez la souris [7, 8] ou chez le chien [9], sans pour autant avoir un effet notoire sur les caractéristiques du vieillissement [8]. Chez le singe, une étude préliminaire montre que le marmoset semble avoir moins d’effets secondaires que dans les autres espèces [10].
Chez l’Homme, il existe très peu d’études, mais dans l’une d’elles, il a été démontré que la prise de rapamycine chez le sujet âgé permettait d’augmenter sa réponse vaccinale [11], un résultat très contradictoire avec l’effet immunosuppresseur de la rapamycine. Beaucoup d’équipes cherchent à comprendre les tenants et aboutissants d’un éventuel traitement contre le vieillissement avec la rapamycine [12, 13, 14, 15] sans, pour le moment, arriver à un consensus.
- Nombre de publications : plus de 200
- Molécule disponible : sur ordonnance
- Mode d’administration : par injection/intra-veineuse
- Posologie : non déterminée
Antifongique : Cette molécule est un macrolide, elle a donc des propriétés antibiotiques et antifongiques. La rapamycine est bioactive seulement lorsqu’elle s’attache à des molécules du système immunitaire (immunophilines) [1].
Lutte contre Alzheimer: une étude a récemment mis en évidence l’intérêt d’un traitement à petite dose dans la lutte contre les maladies neurodégénératives, et en particulier contre la maladie d’Alzheimer [16].
Précautions d’emploi de la rapamycine
Hyperlipidémie: La rapamycine peut avoir des conséquences métaboliques indésirables, telles qu’une augmentation anormale du taux de triglycérides dans le sang, souvent associé à des niveaux de mauvais cholestérol [3].
Intolérance au glucose : À cause de son effet diabétogénique qui pourrait causer des dysfonctions de la sécrétion d’insuline, la rapamycine pourrait être à l’origine, post-greffe, d’une intolérance au glucose, ou d’un diabète de type II [2, 3].
Haute toxicité rénale : Des études expérimentales suggèrent que cette molécule pourrait causer des lésions tubulaires aiguës. Il a été prouvé que la rapamycine ralentit la récupération de la fonction rénale et compromet sa réponse régénérative [3].
Vers des équivalents naturels ?
Un étude récente a tenté d’identifier des homologues de la rapamycine en répertoriant toutes les molécules naturelles ayant une structure chimique similaire et des propriétés comparables [17]. En combinant plusieurs de ces molécules, il est probable d’obtenir une action anti-vieillissement du même ordre que la rapamycine, en diminuant ses effets secondaires. Des études supplémentaires seront nécessaires afin de confirmer les molécules candidates.
Attention ! La rapamycine est une molécule dangereuse, à ne pas utiliser sans avis médical. A l’heure actuelle, ses indications ne comprennent pas la lutte contre le vieillissement.
[1] Mayoclinic.org – Drugs and Supplements – Sirolimus
[2] Stallon et al., Management of Side Effects of Sirolimus Therapy. Transplantation. 2009 Apr 27;87(8 Suppl):S23-6
[3] Simon C. Johnson and Matt Kaeberlein, Rapamycin in aging and disease: maximizing efficacy while minimizing side effects, Oncotarget. 2016 Jul 19; 7(29): 44876–44878
[4] Kaeberlein et al., Resveratrol and rapamycin: are they anti-aging drugs. Bioessays. 2010 Feb;32(2):96-9
[5] Hay N, Sonenberg N, Upstream and downstream of mTOR, Genes Dev, , vol. 18;16 p. 1926-45
[6] Weichhart T, mTOR as Regulator of Lifespan, Aging, and Cellular Senescence: A Mini-Review. Gerontology. 2017 Dec 1. doi: 10.1159/000484629. [Epub ahead of print]
[7] David E. Harrison, Randy Strong et al. Rapamycin fed late in life extends lifespan in genetically heterogeneous mice, Nature. 2009 Jul 16; 460(7253): 392–395
[8] Neff F, Flores-Dominguez D et al., Rapamycin extends murine lifespan but has limited effects on aging. J Clin Invest. 2013, Aug;123(8):3272-91
[9] The Dog Aging Project (informations disponibles en ligne)
[10] Ross C, Salmon A, Strong R, Fernandez E, Javors M, Richardson A, Tardif S. Metabolic consequences of long-term rapamycin exposure on common marmoset monkeys (Callithrix jacchus). Aging (Albany NY). 2015 Nov;7(11):964-73.
[11] Joan B. Mannick, Giuseppe Del Giudice et al. mTOR inhibition improves immune function in the elderly, Science Trans. Med., 2014:Vol. 6, Issue 268, pp. 268ra179
[12] Brian K. Kennedy and Juniper K. Pennypacker Drugs That Modulate Aging: The Promising yet Difficult Path Ahead, Transl Res. 2014, 163(5): 456–465.
[13] Brian K. Kennedy and Juniper K. Pennypacker, Aging interventions get human, Oncotarget. 2015 Jan; 6(2): 590–591
[14] Klimova B, Novotny M, Kuca K. Anti-Aging Drugs – Prospect of Longer Life? Curr Med Chem. 2017. doi: 10.2174/0929867325666171129215251. [Epub ahead of print]
[15] Ehninger D, Neff F, Xie K. Longevity, aging and rapamycin. Cell Mol Life Sci. 2014, 71(22):4325-46.
[16] Arlan Richardson, Veronica Galvan, Ai-Ling Lin, Salvatore Oddo, How longevity research can lead to therapies for Alzheimer’s disease: The rapamycin story, Experimental Gerontology, Vol 68, 2015, Pages 51-58
Dr. Marion Tible
Author/Reviewer
Auteure/Relectrice
Marion Tible has a PhD in cellular biology and physiopathology. Formerly a researcher in thematics varying from cardiology to neurodegenerative diseases, she is now part of Long Long Life team and is involved in scientific writing and anti-aging research.
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Marion Tible est docteur en biologie cellulaire et physiopathologie. Ancienne chercheuse dans des thématiques oscillant de la cardiologie aux maladies neurodégénératives, elle est aujourd’hui impliquée au sein de Long Long Life pour la rédaction scientifique et la recherche contre le vieillissement.
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