Mitochondries : la clef d’une seconde jeunesse pour un nouveau modèle de souris
Les mitochondries sont au centre de la recherche anti-vieillissement et la perturbation d’un certain nombre de leurs fonctions fait partie des 9 causes du vieillissement [1]. De multiples publications font état de l’implication du dysfonctionnement mitochondrial et de la baisse du nombre de mitochondries lors du vieillissement et les maladies liées à l’âge. Des études ont aussi suggéré que la quantité d’ADN mitochondrial diminuait avec l’âge et dans certains tissus, mais les connaissances à ce sujet restent minces. Une équipe de chercheurs de l’Université d’Alabama de Birmingham s’est penchée sur la question et a récemment prouvé que l’épuisement de l’ADN des mitochondries était impliqué dans certains changements phénotypiques associés à l’âge [2].
En effet, ces chercheurs ont créé un modèle de souris capables d’épuiser leur ADN mitochondrial. Ceci est possible en provoquant une mutation dans l’ADN polymérase qui devient alors incapable de répliquer l’ADN. Cette mutation est effective uniquement après l’ingestion de doxycycline, un antibiotique initialement utilisé pour empêcher la synthèse protéique des bactéries. On assiste ensuite à une baisse de la quantité d’ADN mitochondrial et, de facto, de l’activité des mitochondries, et ce, dans tout le corps. En quatre semaines, les souris ont progressivement changé de phénotypes : leurs poils devenant blancs et moins denses, allant jusqu’à l’alopécie. L’apparition de rides sur la peau et d’une inflammation a aussi été observée. Ces traits phénotypiques sont caractéristiques du vieillissement humain. D’autres changements associés à l’âge ont été observés : la perte de poids et de taille, une diminution des mouvements et une léthargie.
Les souris modèles montrent un phénotype âgé après l’épuisement de l’ADN des mitochondries
L’épuisement de l’ADN mitochondrial a conduit au décès des souris étudiées. Seulement 50 % des souris ont vécu au-delà de 40 jours après l’ingestion de doxycycline, et toutes celles ayant survécu jusqu’au trentième jour perdaient leurs poils jusqu’à l’alopécie. Ces observations font état de l’urgence vitale de maintenir les fonctions des mitochondries pour la longévité. A noter également que la réponse, suite au traitement à la doxycycline, était différente entre mâles et femelles. Les chercheurs ont observé une plus grande perte des poils chez les femelles, ainsi qu’une formation plus sévère des rides, qu’ils imputent potentiellement à l’influence des hormones sexuelles qui contrôlent la fonction mitochondriale.
Pour prouver que ces changements phénotypiques étaient bien attribuables à l’épuisement de l’ADN mitochondrial, les chercheurs ont effectué des « expériences de sauvetage » : elles consistent à retirer la doxycycline, rétablissant ainsi la fonction de l’ADN polymérase. Cette action a restitué la quantité normale d’ADN des mitochondries et renversé les changements phénotypiques observés chez les souris. Les souris ont retrouvé une apparence normale après un mois d’arrêt du traitement, comme représenté sur l’image plus bas. De plus, des souris dites “contrôle” (non représentées) ne portant pas la mutation mais traitées avec de la doxycycline, ou porteuses de la polymérase mutée mais non traitées à la doxycycline, n’ont pas montré de phénotype âgé. Cette analyse témoigne que les changements phénotypiques ont été induits par l’épuisement de l’ADN mitochondrial, et peuvent être inversés en rétablissant la fonction des mitochondries [2].
Crédit : UAB
C’est grâce au modèle animal développé pour cette étude que les chercheurs ont réussi à répondre à certaines questions concernant le rôle de l’épuisement de l’ADN mitochondrial lors du vieillissement. Ces animaux génétiquement modifiés sont des outils prometteurs pour la recherche anti-âge. Les chercheurs pensent que les découvertes portées par ces souris pourraient permettre de développer des thérapeutiques contre les anomalies liées aux dysfonctionnements des mitochondries et, pourquoi pas, développer des traitements préventifs contre les rides et la perte de cheveux liées à l’âge [2].
Références
[1] Carlos Lopez-Otı́n, Maria A. Blasco, Linda Partridge, Manuel Serrano and Guido Kroemer, The Hallmarks of Aging, Cell 153, June 6, 2013, 1194-1217. http://dx.doi.org/10.1016/j.cell.2013.05.039
[2] Bhupendra Singh, Trenton R. Schoeb, Prachi Bajpai, Andrzej Slominski, Keshav K. Singh. Reversing wrinkled skin and hair loss in mice by restoring mitochondrial function. Cell Death & Disease, 2018; 9 (7) DOI: 10.1038/s41419-018-0765-9
[3] University of Alabama at Birmingham. « Scientists reverse aging-associated skin wrinkles and hair loss in a mouse model: A gene mutation causes wrinkled skin and hair loss; turning off that mutation restores the mouse to normal appearance.. » ScienceDaily. ScienceDaily, 20 July 2018. <www.sciencedaily.com/releases/2018/07/180720112808.htm>
Anne Fischer
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Anne is studying medicine science at the Institute of Pharmaceutical and Biological Science in Lyon and she has graduated with a Bachelor’s degree in molecular and cellular biology at the University of Strasbourg.
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Anne étudie les sciences du médicament à l’Institut des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques de Lyon. Elle est titulaire d’une licence en biologie moléculaire et cellulaire de l’Université de Strasbourg.
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